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Quand faut-il faire aveu de faillite ?

03/04/2025

Chaque entreprise peut être confrontée à des difficultés de trésorerie.
Lorsque ces difficultés persistent, que les dettes s’accumulent et que les créanciers s’impatientent, une question redoutée finit souvent par s’imposer : faut-il déclarer la faillite ? Des alternatives à la faillite sont-elles possibles (PRJ, PRJ privée, médiation, dissolution volontaire, …). Derrière cette décision difficile se cachent des enjeux juridiques importants, mais aussi des opportunités pour repartir sur des bases saines.

Dans cet article, nous faisons le point sur les conditions, les délais et les conséquences de l’aveu de faillite, afin de vous permettre d’anticiper les risques, de prendre les bonnes décisions et, surtout, d’agir au bon moment.

Qu’est-ce que l’aveu de faillite ?

L’aveu de faillite est la démarche par laquelle une entreprise (société, asbl, entreprise en personne physique) reconnait être en état de cessation (persistante) de paiement et d’ébranlement de son crédit. Il s’agit d’une déclaration volontaire faite auprès du Registre de la Solvabilité (REGSOL), qui ouvre la voie à une procédure de faillite. Cette procédure vise notamment à organiser la liquidation du patrimoine de l’entreprise et l’apurement de son passif.

L’aveu de faillite ne doit pas être confondu avec la faillite prononcée à la demande d’un créancier ou du Procureur du Roi. Dans le premier cas, c’est l’entreprise elle-même qui prend l’initiative de la procédure de faillite, ce qui est souvent perçu comme un acte de gestion responsable. Dans le second cas, c’est bien un créancier (ou le Parquet du Procureur du Roi) qui prend l’initiative de citer en faillite devant le tribunal de l’entreprise compétent.

Les conditions légales de la faillite

Le code de droit économique impose deux conditions cumulatives pour qu’une entreprise soit déclarée en faillite : la cessation (persistante) de paiement et l’ébranlement du crédit.

La cessation de paiements signifie que l’entreprise n’est plus en mesure de s’acquitter de ses dettes à leur échéance, et ce, de manière durable. Quant à l’ébranlement du crédit, il s’agit de la perte de confiance des créanciers (fournisseurs, ONSS, SPF FINANCES, travailleurs, …), ce qui se traduit par des actions en justice, des tentatives d’exécution via huissier, etc. Il suffit cependant de ne pas être en mesure de payer un seul créancier (même pour un montant minime) qui exige son paiement pour que les conditions de la faillite soient réunies.

Le délai pour déposer l’aveu de faillite

Lorsqu’une entreprise est en situation de faillite, elle dispose d’un délai d’un mois pour déposer l’aveu de faillite sur REGSOL(le Registre de la Solvabilité). Ce délai court à partir du moment où les deux conditions légales sont réunies. Il s’agit d’une obligation impérative, et non d’une simple faculté.

Un dépôt tardif peut entrainer des conséquences sérieuses pour les dirigeants, notamment une action en responsabilité personnelle, voire justifier une procédure pénale à l’initiative du parquet. Il est donc primordial d’agir rapidement dès que les signes d’insolvabilité sont manifestes.

Comment savoir si le moment est venu ?

Il n’est pas toujours évident de déterminer le moment opportun pour déposer un aveu de faillite. De nombreuses entreprises espèrent une amélioration de leur situation financière ou attendent une rentrée de fonds salvatrice. Pourtant, certains signes doivent alerter : retards persistants de paiement, arriérés fiscaux et sociaux, ruptures de lignes de crédit, saisies ou assignations en justice.

Une analyse rigoureuse de la trésorerie, du carnet de commandes, des dettes exigibles et des perspectives de relance est indispensable. En cas de doute, il est recommandé de consulter tout d’abord un expert-comptable et ensuite un avocat spécialisé en droit des entreprises en difficulté afin d’évaluer objectivement la situation avec tout le recul nécessaire.

L’aveu de faillite comme outil de protection

Loin d’être un échec, l’aveu de faillite est souvent un acte de gestion responsable. Il permet d’organiser une liquidation ordonnée des actifs de l’entreprise et d’apurer (partiellement) le passif sous le contrôle du curateur et du tribunal. Pour les dirigeants, il participe à réduire sa responsabilité personnelle dans le cadre de la procédure de faillite.

Dans certains cas, des activités saines peuvent être cédées ou reprises, permettant ainsi une certaine continuité. Par ailleurs, un aveu dument préparé peut éviter des poursuites ultérieures et faciliter un éventuel rebond professionnel. L’essentiel est d’agir à temps et de manière structurée.

Le rôle de l’avocat dans cette démarche

Un avocat expérimenté en droit de l’insolvabilité peut jouer un rôle clé dans l’accompagnement du dirigeant confronté à des difficultés financières. Il peut évaluer la situation de l’entreprise, conseiller sur le moment opportun pour l’aveu, et préparer le dossier à remettre au tribunal et au curateur.

L’avocat veille aussi à protéger les intérêts personnels du dirigeant de la personne morale, en s’assurant qu’aucune faute ne pourra lui être reprochée. Il peut également envisager d’autres alternatives à la faillite, telles que la procédure de réorganisation judiciaire.

Et après l’aveu

Après le dépôt de l’aveu, le tribunal examine la demande et peut prononcer la faillite. Un curateur est alors désigné. Son rôle consiste notamment à organiser la liquidation des biens et le paiement des créanciers. L’entreprise et ses dirigeants devront collaborer activement, fournir les documents nécessaires et répondre aux questions posées.

Selon les circonstances, certaines dettes peuvent subsister à charge du dirigeant, notamment en cas de caution personnelle ou en cas de refus d’effacement (pour les personnes physiques).

Conclusion

La faillite n’est pas la fin de tout — c’est parfois le début d’une reconstruction. Encore faut-il avoir agi avec discernement et dans le respect de la loi. Faire aveu de faillite, c’est avant tout reprendre le contrôle de la situation, protéger ses droits et poser les bases d’un nouveau départ.

Vous vous interrogez sur la situation de votre entreprise ? Vous craignez d’attendre trop longtemps ou de ne pas respecter vos obligations ?

Prenez contact avec notre cabinet : nous vous aiderons à y voir clair, à évaluer les options possibles, et à poser les bons choix, dans un cadre juridique maitrisé et respectueux de vos intérêts.

Yannick Alsteens

Clémentine Malschalck